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L’Europe vient de dévoiler les droits d’importation qu’elle appliquera aux fabricants chinois de voitures électriques. Ils varient entre 17,4 % (BYD) et 38,1 % (MG) et pourraient entrer en vigueur dès le 4 juillet si « les discussions avec les autorités chinoises ne devaient pas aboutir à une solution efficace ».
La bataille entre la Chine et l’Europe sur les voitures électriques ne date pas d’hier. En septembre 2023, Ursula von der Leyen rappelait que « notre industrie solaire avait pâti des pratiques commerciales déloyales de la Chine » et que le marché des voitures électriques était en train de faire face aux mêmes travers.
Les griefs portaient sur des entreprises chinoises fortement subventionnées pour écraser la concurrence et rafler le marché. Une « enquête antisubventions sur les véhicules électriques en provenance de Chine » était annoncée. Elle a été ouverte peu de temps après, début octobre.
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Les griefs de l’Europe envers la Chine
L’Europe reprochait alors à la Chine l’octroi aux entreprises locales de prêts et crédits à des conditions préférentielles, des réductions, voire des exonérations d’impôts et de taxes. Les griefs portaient aussi sur la fourniture de biens « tels que des matières premières, des intrants, ainsi que des composants » à des tarifs jugés « plus que préférentiels ».
L’approvisionnement en matières premières est un enjeu géopolitique important dans de nombreux secteurs du numérique et de la transition écologique. L’Europe s’est d’ailleurs récemment alliée à l’Australie, une réserve importante de plusieurs matériaux critiques et rares. Idem avec le nickel en Nouvelle-Calédonie.
Ce déséquilibre commercial se combine et surtout accentue la pression des fabricants chinois sur leurs concurrents européens. La conséquence n’est pas à chercher bien loin : une augmentation significative des importations des voitures électriques chinoises, « tant en quantités absolues qu’en parts de marché ».
Pour l’Europe, il y a bien des « subventions déloyales »
Pour réparer son préjudice, l’Europe expliquait qu’une augmentation des droits de douane était prévue. La Commission vient de rendre son verdict et met en œuvre son plan d’action. Elle « conclut provisoirement que les chaînes de valeur des véhicules électriques en Chine bénéficient de subventions déloyales ».
Il s’agit pour le moment de montrer ses muscles, avant de (très) rapidement passer à l’action :
« La Commission a préalablement notifié le niveau des droits compensateurs provisoires qu’elle instituerait sur les importations de véhicules électriques à batterie en provenance de Chine.
Si les discussions avec les autorités chinoises ne devaient pas aboutir à une solution efficace, ces droits compensateurs provisoires seraient introduits à partir du 4 juillet par constitution d’une garantie (selon la forme qui sera décidée par les autorités douanières de chaque État membre). Ils ne seraient perçus que si des droits définitifs sont institués, et à ce moment-là uniquement ».
Jusqu’à 38,1 % pour SAIC (MG)
Pour trois fabricants de voitures chinois retenus dans l’échantillon analysé de près par la Commission, le taux diffère selon les marques. BYD écope du plus faible droit compensateur avec 17,4 %, suivi par Geely (Polestar et Volvo notamment) avec 20 % et enfin 38,1 % pour SAIC (MG entre autres).
Le détail du calcul est envoyé au gouvernement chinois et aux sociétés concernées, qui peuvent évidemment formuler des observations. Le délai est toutefois relativement court : « trois jours ouvrables pour exercer ce droit », peut-on lire dans la foire aux questions.
« Lorsque ces observations apportent suffisamment d’éléments de preuve contribuant à contrebalancer ses calculs, la Commission peut revoir ceux-ci dans le respect du droit de l’Union ».
21 % pour les fabricants qui ont collaboré
Pour les producteurs qui ont coopéré à l’enquête, mais qui ne sont pas retenus dans l’échantillon pour un calcul précis, le taux retenu est de 21 %.
Il s’agit de la moyenne pondérée des taux de l’échantillon. Dans la liste, on retrouve Aiways, Anhui Jianghuai, BMW Brillance, Chery , China FAW, Chongping Changan, Dongfeng Motor, Grat Wall Motor, Leapmotor, Nanjing Golden Dragon, NIO, Tesla et XPeng.
Selon la Commission, Tesla a demandé « un taux de droit calculé individuellement », qui devrait être dévoilé plus tard. Elle ajoute que « tout autre producteur de véhicules électriques à batterie en Chine non retenu dans l’échantillon final et souhaitant que sa situation particulière soit examinée peut demander un réexamen accéléré, conformément au règlement antisubventions de base, immédiatement après l’institution des mesures définitives ».
Par contre, les sociétés qui n’ont pas coopéré écopent du taux maximum mis en place (c’est-à-dire celui de SAIC), soit 38,1 %. Il concerne donc toutes les entreprises qui ne sont pas citées précédemment.
L’UE veut « une concurrence équitable »
La Commission précise enfin que ces droits compensateurs sont dans tous les cas à ajouter « aux droits d’importation ordinaires de 10 % prélevés sur les importations de véhicules électriques à batterie ». Ces derniers sont déjà en place. En octobre, Thierry Breton rappelait que les droits de douane étaient de 27,5 % aux États-Unis pour ces mêmes voitures.
Dans sa foire aux questions, la Commission affirme que « l’objectif n’est pas de fermer le marché de l’UE à de telles importations », mais de « garantir que les industries européennes et chinoises se livrent une concurrence équitable ».
Rendez-vous le 4 juillet 2024… puis en novembre
Désormais, la Commission européenne doit publier au Journal officiel, au plus tard le 4 juillet 2024, « un règlement expliquant en détail les conclusions provisoires ayant conduit à ce niveau de droits. Les droits entreraient en vigueur le lendemain de la publication ». Il s’agit alors de droits provisoires.
Il sera alors temps de voir si une rétroactivité sera aussi mise en place. Ensuite, « l’institution de mesures définitives doit avoir lieu au plus tard 4 mois après celle des droits provisoires », ce qui nous emmène à début novembre.
Sans surprise, Pékin dénonce « un comportement purement protectionniste » et avertit que le pays « prendra toutes les mesures pour défendre fermement ses droits légitimes », comme le rapporte Le Monde.
Pour rappel, en France, les conditions d’obtention du bonus écologique ont évolué depuis le début de l’année, avec une liste très réduite de modèles (pas forcément toutes les références, se référer à l’arrêté) pouvant en profiter : Fiat 500, Renault 5 et Kangoo, Tesla Model Y, Volkswagen ID. 7, Volvo EC40 et EX40. Dacia avec sa Spring et MG avec sa MG4 n’ont même pas déposé de dossier par exemple. La Tesla Model Y dans la liste est celle produite en Allemagne, alors que la Model 3 vient de Chine.