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Écoconception numérique : l’Arcep adresse ses recommandations à l’Europe

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« Peut mieux faire »
Écoconception numérique : l’Arcep adresse ses recommandations à l’Europe

L’Arcep, de plus en plus impliquée sur les questions environnementales, a publié récemment sa position sur l’écoconception et l’étiquetage énergétique des produits numériques. Le document est adressé à la Commission européenne, qui travaille sur plusieurs cadres. Sans surprise, l’Autorité milite pour renforcer les mesures actuelles.

Depuis plusieurs années, l’Arcep participe activement à l’élaboration de rapports sur les liens entre numérique et environnement. Le Pôle numérique, qu’elle forme avec l’Arcom (avec la participation de l’ADEME), publie régulièrement un état des lieux sur la consommation du numérique en France. Elle était en mai dernier aux premières loges pour le lancement du Référentiel général d’écoconception des services numériques (RGESN).

Dans un document (pdf en anglais) publié il y a quelques jours et adressé à la Commission européenne, l’Arcep rappelle que l’Europe a été « à l’avant-garde de la réglementation en matière d’écoconception ». Pour preuve, l’entrée en vigueur le 18 juillet du Règlement sur l’écoconception des produits durables (ESPR).

Cependant, puisque la Commission travaille sur plusieurs actes délégués sur l’écoconception et l’étiquetage énergétique des ordinateurs, et dans le cadre du plan de travail sur l’écoconception et l’étiquetage énergétique prévu pour 2025-2026, l’Arcep avance trois propositions.

Atténuer l’obsolescence logicielle des ordinateurs

L’Arcep rappelle que 65 à 90 % de l’empreinte environnementale du numérique en France provient aujourd’hui des appareils. 100 millions d’ordinateurs constituent à eux seuls 22 % de l’empreinte carbone du numérique. La fabrication des appareils grand public, des centres de données et des réseaux représentent près de 80 % de cette empreinte. L’Autorité reprend les chiffres publiés en mars 2023 dans son rapport écrit conjointement avec l’ADEME sur les prévisions et scénarios pour 2030 et 2050.

Pour l’Autorité, le calcul est simple : « toute action permettant d’allonger la durée de vie des appareils et de réduire le taux élevé de renouvellement doit être envisagée pour réduire leur empreinte écologique ». L’obsolescence des logiciels a en effet déjà été identifiée comme l’un des principaux facteurs de renouvellement matériel. Elle figure d’ailleurs en bonne place du RGSEN.

L’Arcep demande donc à la Commission européenne de considérer l’impact des systèmes d’exploitation sur l’obsolescence des appareils. Elle propose que les fabricants et distributeurs d’ordinateurs assurent la maintenance des systèmes d’exploitation qu’ils choisissent de préinstaller sur leurs produits pendant dix ans. Une longue période, dont le compte à rebours commencerait à la fin de la commercialisation de l’ordinateur.

Question de cohérence pour l’Autorité, puisque cette durée fait écho aux sept ans prévus par un règlement européen sur les smartphones et tablettes. Règlement qui entrera en vigueur dans un peu moins d’un an, le 20 juin 2025.

Cercle vertueux

L’Arcep ajoute que la durée de vie des ordinateurs « peut facilement dépasser 10 à 15 ans ». Toutefois, le système fourni peut rarement être utilisé en toute sécurité pendant toute cette durée. En conséquence, les responsables informatiques renouvellent « par anticipation les ordinateurs portables et de bureau uniquement pour atténuer les risques de cybersécurité ». Et ce, même s’ils sont encore capables de réaliser les tâches pour lesquelles ils ont été achetés.

L’Autorité y voit trois avantages principaux : pouvoir d’achat (plus besoin de renouveler prématurément le matériel) et responsabilisation pour la clientèle, cybersécurité et environnement. Ralentir le rythme du renouvellement entrainerait une « réduction significative des émissions de gaz à effet de serre, des déchets électroniques, de la consommation d’eau et de minéraux/métaux liés au cycle de vie des ordinateurs ».

Dans une note en bas de page, l’Arcep souligne bien sûr le cas de Windows 10, qui prendra sa retraite en octobre 2025. Selon une étude citée de Canalys Research, cette fin de cycle et l’incompatibilité d’une partie du parc avec Windows 11 pourrait entrainer la mise au ban de 240 millions de PC. L’Arcep épingle également Apple, dont les Mac ne sont supportés que pendant 6 à 8 ans.

Des efforts sur les mises à jour et systèmes alternatifs

Au-delà de cette demande, l’Arcep incite la Commission à se pencher sur d’autres points liés. Elle cite la distinction claire entre les mises à jour « essentielles » (corrections et sécurité) et « non essentielles » (fonctions supplémentaires par exemple). Elle souhaite aussi que ces mises à jour fonctionnelles n’aient pas d’impact négatif sur les performances et que des microprogrammes (firmwares) soient proposés régulièrement. Les fournisseurs d’appareils seraient encouragés à faciliter l’installation de systèmes alternatifs. On pense bien sûr à Linux.

Enfin, si l’Arcep « accueille favorablement » l’arrivée d’un étiquetage énergétique des ordinateurs, elle estime qu’il peut aller plus loin. Elle aimerait notamment voir inclus un « indice de durabilité/réparabilité dans cet étiquetage ».

Étendre les politiques d’écoconception aux services numériques

Il fallait s’y attendre. Lors du lancement du RGSEN à Paris en mai, Laure de La Raudière, présidente de l’Arcep, indiquait que l’étape suivante était de le faire remonter aux instances européennes. En France, le RGSEN constitue un lot de conseils chaudement recommandés, mais il n’est pas contraignant.

L’Arcep monte donc au créneau et suggère à la Commission européenne que l’écoconception devrait être une approche globale. Par conséquent, elle devrait être étendue aux services numériques, puisque l’ESPR couvre uniquement les produits matériels.

Les services, qualifiés de « produits immatériels », participent pourtant à l’empreinte carbone, même si dans une proportion beaucoup plus réduite que les appareils, centres de données et réseaux. L’Arcep veut éviter qu’ils restent sous les radars, car plus ils sont utilisés, « plus les ressources nécessaires sont importantes ». Ils « devraient donc faire l’objet d’une plus grande attention ».

Citant les travaux réalisés en commun avec l’ADEME, l’Autorité souligne « l’importance de prendre en compte les interdépendances entre l’empreinte environnementale des infrastructures et celle des appareils, qui sont liées puisqu’elles soutiennent toutes deux l’utilisation des services ».

À ce sujet, l’Arcep rappelle à la Commission européenne que cette extension serait « cohérente » avec les réflexions abordées dans le livre blanc publié en février dernier sur les besoins de l’Europe en matière d’infrastructure numérique.

Les quatre avantages mis en avant sont, sans surprise, ceux déjà pointés par le RGSEN : augmentation de la durée de vie des appareils, l’optimisation des ressources nécessaires au cycle de vie des services, une limitation des techniques de captation de l’attention et une plus grande transparence environnementale.

Écoconception, étiquetage : d’autres produits dans la ligne de mire

« Les cadres réglementaires européens sur l’écoconception et l’étiquetage énergétique sont des instruments politiques puissants pour soutenir l’écologisation des économies européennes, tout en favorisant la sensibilisation des consommateurs à l’impact environnemental différencié de leurs produits », estime l’Arcep. Pourquoi, dès lors, ne pas les étendre à d’autres produits ?

L’Autorité pense plus précisément à tous ceux ayant un impact significatif sur l’environnement. Elle vis en particulier les routeurs et décodeurs, dont la consommation cumulée en 2022 a atteint les 3,3 TWh. Soit plus du triple de la consommation des réseaux fixes, avec 0,7 % de la consommation électrique en France sur cette année. Des chiffres que l’Arcep reprend du dernier rapport sur le numérique soutenable.

Un étiquetage sur de tels produits informerait les consommateurs de cette consommation, notamment des grandes différences pouvant exister entre les modèles. L’Arcep estime que la marge de progression est « importante » sur la réduction de la consommation électrique. Des exigences d’écoconception et la généralisation de la mise en veille profonde pourrait être appliquées aux nouveaux produits mis sur le marché.

L’étape suivante pourrait être l’inclusion de tous les équipements de réseau sans fil, suggère l’Arcep.


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