« La menace en matière d’espionnage et d’ingérence peut paraître moins mortelle » que celle du terrorisme, mais elle n’en est pas moins « dangereuse pour notre démocratie », a expliqué la directrice générale de la sécurité intérieure Céline Berthon sur Franceinfo le 12 mars.
Interrogées sur les ingérences étrangères, la cheffe de la DGSI indique que ces dernières prennent principalement trois formes : de la déstabilisation « de faible intensité, mais amplifiée par leur médiatisation », des actes de repérage « sur des industries, qui contribuent par exemple à l’effort de guerre » vis-à-vis de l’Ukraine, et des tentatives de pression sur des opposants réfugiés présents sur notre territoire.
Quant à leurs auteurs, ils ont dans certains cas été identifiés comme liés à la Russie, par exemple dans l’affaire des pochoirs d’étoiles de David, taguées sur les murs de Paris, « pris en photo et amplifiés artificiellement sur les réseaux sociaux pour faire monter le débat et opposer en France des idées politiques, fracturer la population française » juste après l’attaque d’Israël par le Hamas, ou encore dans celle des punaises de lit.
Cela dit, ces actions peuvent « valoir aussi pour d’autre pays », déclare la dirigeante – une enquête de l’Œil du 20 h revenait par exemple début mars sur les tentatives de l’Algérie de faire taire des opposants présents en France. Céline Berthon précise que les relations sécuritaires entre la France et l’Algérie sont « réduites à leur plus simple expression ».

Sur la question des manipulations en ligne, Céline Berthon insiste : si les réseaux sociaux sont la principale source d’information de beaucoup de personnes, leurs algorithmes peuvent être manipulés par leurs propriétaires, « ce qui est très visible sur X », quand Elon Musk « fait en sorte que ses tweets soient visibles par le monde entier ». Moins visible, mais tout aussi pernicieux : « On a aussi des manipulations par des utilisateurs, qui connaissent les algorithmes, qui savent les utiliser, et font artificiellement naître des sujets. »
Interrogée sur la probabilité de voir se dérouler en France le même scénario que celui constaté en Roumanie, où le candidat d’extrême-droite a surgi en tête du premier tour des élections présidentielles à la surprise générale, Céline Berthon répond : « Le scénario de manipulation de l’information sur les réseaux sociaux, par amplification, via algorithmes, évidemment qu’il est possible », même si elle espère que le système politique français soit « plus établi », donc mieux à même de résister.
En termes de lutte anti-terroriste, la directrice de la DGSI souligne que le « défi majeur » consiste à enrayer les radicalisations en ligne – en droite ligne de la sonnette d’alarme tirée il y a quelques mois par Europol et les services anti-terroristes anglo-saxons.