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EuroStack : les acteurs de la tech appellent à un sursaut de souveraineté européenne

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Demain, c'est trop tard
EuroStack : les acteurs de la tech appellent à un sursaut de souveraineté européenne

Quelque 80 entreprises et représentants de filières du monde de la tech appellent la Commission européenne à s’engager dans le développement d’un socle numérique européen, des infrastructures physiques aux solutions logiques. Avec, comme leviers immédiats, des politiques d’investissement massif, d’achats publics souverains et de standards industriels ouverts.

La Vieille Europe risquerait-elle de se retrouver coincée entre le marteau protectionniste des États-Unis de Donald Trump, et l’enclume aux velléités conquérantes de la Chine ? Dans une lettre ouverte adressée à Ursula von Der Leyen, 83 entreprises et organisations de la tech exhortent la Commission européenne à créer les modalités d’une union sacrée à l’échelle du continent, pour éviter que ce dernier ne se retrouve déclassé.

Une dépendance excessive d’ici trois ans

Devenu une véritable antienne depuis la publication du rapport Draghi sur la compétitivité de l’Europe et les risques de décrochage économique associés, le propos se concentre ici sur les enjeux de la souveraineté numérique, qui donnent son nom à l’initiative associée, EuroStack. Soit une « pile européenne » de solutions, qui, une fois constituée, confèrerait une forme d’indépendance vis-à-vis de ses rivaux.

« L’Europe doit reprendre l’initiative et gagner en indépendance technologique à tous les niveaux de son infrastructure numérique critique : de l’infrastructure logique (applications, plateformes, médias, cadres et modèles d’IA) à l’infrastructure physique (puces, informatique, stockage et connectivité) », exhortent les signataires, parmi lesquels figurent des entreprises comme Airbus, Dassault Systèmes, Sopra Steria, OVHcloud, Scaleway ou Clever Cloud, mais aussi des organisations comme le Conseil national du logiciel libre (CNLL) ou la banque publique d’investissement Bpifrance.

S’ils saluent les annonces positives formulées lors du sommet de Paris sur l’IA – pendant lequel Ursula von Der Leyen a promis une trajectoire public privé de l’ordre de 200 milliards d’euros en direction de la filière, les auteurs ajoutent une dimension d’urgence à leur appel. « Sans un changement radical et urgent, l’Europe sera perdante en matière d’innovation numérique et de croissance de la productivité – ​​au rythme actuel, notre dépendance aux technologies non européennes deviendra presque totale en moins de trois ans ».

Fédérer et privilégier les solutions souveraines

D’où cette idée, présentée comme transpartisane, de construire une véritable pile européenne, qui avait déjà été longuement développée par un collectif d’économistes et d’experts de l’industrie en janvier dernier (PDF), là encore sous l’étiquette EuroStack. « Nous ne pouvons pas nous contenter de réglementer des infrastructures essentielles placées entre des mains non-européennes, en espérant que tout ira pour le mieux (…). Nous devons construire et gouverner l’alternative », appelaient déjà ses membres.

Les signataires du courrier adressé à Ursula von Der Leyen résument de façon plus synthétique leur approche, et suggèrent surtout très directement des leviers à mettre en œuvre. Ils demandent ainsi à l’exécutif européen d’instaurer sans délai aux acteurs publics l’obligation formelle d’acheter européen dès que possible. « L’objectif n’est pas d’exclure les acteurs non européens, mais de créer un espace où les fournisseurs européens peuvent légitimement concourir (et justifier leurs investissements) », justifient-ils.

Partant du principe que l’Europe est historiquement pénalisée par son manque d’unité, ils recommandent ensuite la mise en œuvre d’une politique visant à rassembler et fédérer les acteurs de la tech, pour parvenir à créer rapidement des offres cohérentes à partir des briques éparses à l’échelle du continent. « Cela implique de collaborer à nouveau avec l’industrie pour inventorier rapidement les ressources, soutenir les solutions open source et l’interopérabilité (tant sur le plan technique que commercial), regrouper les meilleures ressources existantes, faciliter l’intégration avec des plateformes d’intégration et réduire les obstacles à la conformité, tout en respectant les impératifs de localisation et de sécurité ».

Création d’un fonds d’infrastructure souverain

Ils appellent par ailleurs à prioriser les services susceptibles d’entraîner une adoption rapide – et donc des effets immédiats sur le plan économique. Ils demandent également à créer les conditions d’un développement harmonieux pour les solutions cloud dédiées aux données sensibles, en réservant par exemple la certification EUCS aux solutions garantissant que ces dernières sont à l’abri des lois extraterritoriales états-uniennes (niveau High+).

Sur le volet financier enfin, les signataires suggèrent un changement d’approche dans la façon dont la Commission européenne alloue ses soutiens, avec la création d’un fonds d’infrastructure souverain, capable d’abonder l’action des acteurs publics et privés nationaux sur les segments les plus gourmands en capital de la chaîne, comme la fabrication de semiconducteurs ou le développement du quantique.

Quels seraient les montants à mobiliser ? La lettre ouverte n’avance aucun chiffre, mais les partisans d’EuroStack ont un point de comparaison tout trouvé avec les États-Unis, leur Chips Act historiquement doté de 280 milliards de dollars et le fameux plan Stargate à 500 milliards de dollars annoncé par Donald Trump peu après son investiture. « Un investissement à hauteur de 300 milliards d’euros dans le futur de l’Europe ne devrait pas sembler utopique », estime Andrea Reda, chercheur au CEPS (Centre for European Policy Studies).


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